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mercredi 29 mai 2013

Un bûcher sous la neige

Il est assez rare qu'un livre me touche profondément. Outre devenir un de mes ouvrages préférés, certains vont parfois plus loin que d'autres et me touchent en plein cœur. Ce fut le cas avec "Un bûcher sous la neige" de Susan Fletcher qui a, oserai-je le dire, touché mon âme (et il a beaucoup de touchage dans cette phrase).


Nous sommes en 1692. Sur le trône d'Angleterre se trouve Guillaume d'Orange, de religion protestante, qui en a chassé Jacques Stuart, catholique, et réfugié en France. Le pays se retrouve divisé en fonction de l’allégeance et de la religion de chacun, avec les "papistes" ou "jacobites" qui tentent de renverser Guillaume comme ils le peuvent.

C'est aussi une période sombre de l'histoire. Celle où l'on torturait et exécutait violemment des femmes soit disant sorcières. En général, des femmes indépendantes, fortes d'esprit et qui savaient quelles herbes pouvaient guérir les maux. Des femmes comme Corrag.

L'histoire débute et Corrag est en mauvaise posture. Enfermée dans un cachot, accusée de sorcellerie, elle attend l'heure de son exécution par le feu, qui viendra quand l'hiver sera passé. Outre le fait que c'est une "putain du diable, une gueuse", Corrag est aussi un des seuls témoins à avoir vu et su ce qui s'est réellement passé à Glencoe, dans les Highlands. Un massacre y a été commis, décimant le clan McDonald. Une boucherie sans nom lors de laquelle hommes, femmes, enfants et vieillards ont été massacrés dans leur sommeil par des soldats qu'ils avaient accueillis chez eux. Et ce, sur ordre de Guillaume.

Vient alors Charles Leslie, révérend irlandais et jacobite, qui compte bien obtenir de Corrag qu'elle lui conte ce qui s'est réellement passé, et ce afin de pouvoir accuser Guillaume et de peut-être faire revenir Jacques sur le trône. En digne serviteur de Dieu qu'il est, il n'a tout d'abord qu'horreur et dégoût pour Corrag, femme-enfant à la voix aiguë, sorcière qui tente de l'enchanter et qui ne lui dira ce qu'il veut savoir que si il écoute le récit de sa vie. De ses vies.

Le roman est écrit à quatre mains ai-je envie de dire: il a d'abord Corrag qui nous conte sa vie telle qu'elle la narre à Charles. Et Charles qui relate ce que Corrag lui a dit et ce qu'il en pense à sa femme via de longues missives. 

Que dire si ce n'est que Corrag est pour moi un des plus beaux personnages de littérature que j'ai jamais rencontrée. Une personne belle, bonne, positive, douce, compréhensive, mais aussi solitaire, amoureuse, forte, intelligente, avec une vision des choses unique et une lueur en elle qui éclaire tout sur son passage. 

Je me suis sentie proche d'elle par moment, par son amour du froid et de l'hiver et par sa manière de voir le beau dans de petites choses de la nature que la plupart des gens ignorent: la neige qui scintille, la lueur bleue du jour sur la glace, les plantes qu'elle regarde pousser, la beauté d'un caillou, la grandeur des montagnes, le vent dans ses cheveux, les nuages qui défilent. Sa solitude aussi, qu'elle savoure parfois, parce que certaines choses ne peuvent être partagées. 

Si Susan Fletcher écrit, c'est par Corrag que l'on lit. On traverse avec elle les Highlands, on sent sur nos jambes la bruyère, les fougères, l'herbe, le givre. On se baigne avec elle dans des eaux glacées et on sent l'odeur forte de ces hommes rudes et roux. Et plus on avance dans son récit, plus ce que l'on pensait vraiment important - le massacre du Clan - passe au second plan. Je n'avais pas envie d'arriver à ce chapitre sanglant, je voulais rester avec Corrag sur les pentes de son vallon à observer son cerf et à rêver de "Lui". Je ne voulais pas qu'ils meurent. Je ne voulais pas qu'on la brûle parce qu'elle avait été une bonne personne. Je n'ai jamais eu autant de mal à tourner des pages. 

Un bûcher sous la neige est pour moi un chef d'oeuvre qui me serre le cœur, me rend triste et joyeuse en même temps, mais surtout, me dit de savourer la vie, d'ouvrir les yeux, de croire que ce monde a peut-être des êtres comme Corrag en son sein, et qui me convainc presque de ne pas avoir peur des araignées. 

Lisez-le. Tombez amoureux de Corrag, et trouvez-la en vous.

 

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